Notes sur ce que je cherche

Ce texte bref de Georges Perec a d'abord été publié par Le Figaro le 8 décembre 1978. Ouvrant le recueil Penser/classer publié par Hachette en 1985 (p.9-12), il raconte l'histoire d'un constat que trois raisons vont "justifier", en toute complémentarité...     ;-)

Notes sur ce que je cherche

Ce texte bref de Georges Perec a d'abord été publié par Le Figaro le 8 décembre 1978. Ouvrant le recueil Penser/classer publié par Hachette en 1985 (p.9-12), il raconte l'histoire d'un constat que trois raisons vont "justifier", en toute complémentarité...     ;-)

Regardons comment ce texte est articulé

Si je tente de définir ce que j’ai cherché à faire depuis que j’ai commencé à écrire, la première idée qui me vient à l’esprit est que je n’ai jamais écrit deux livres semblables, que je n’ai jamais eu envie de répéter dans un livre une formule, un système ou une manière élaborés dans un livre précédent.

Cette versatilité systématique a plusieurs fois dérouté certains critiques soucieux de retrouver d’un livre à l’autre la "patte"de l’écrivain ; et sans doute a-t-elle aussi décontenancé quelques-uns de mes lecteurs. Elle m’a valu la réputation d’être une sorte d’ordinateur, une machine à produire des textes.

Énoncé 1

Le constat de la "versatilité systématique"

Énoncé 1

Pour ma part, je me comparerais plutôt à un paysan qui cultiverait plusieurs champs ; dans l’un il ferait des betteraves, dans un autre de la luzerne, dans un troisième du maïs, etc. De la même manière, les livres que j’ai écrits se rattachent à quatre champs différents, quatre modes d’interrogation qui posent peut-être en fin de compte la même question, mais la posent selon des perspectives particulières correspondant chaque fois pour moi à un autre type de travail littéraire.


La première de ces interrogations peut être qualifiée de "sociologique" : comme de regarder le quotidien ; elle est au départ de textes comme Les Choses, Espèces d’espaces, Tentative de description de quelques lieux parisiens, et du travail accompli avec l’équipe de Cause commune autour de Jean Duvignaud et de Paul Virilio ; la seconde est d’ordre autobiographique : W ou le souvenir d’enfance, La Boutique obscure, Je me souviens, Lieux où j’ai dormi, etc. ; la troisième, ludique, renvoie à mon goût pour les contraintes, les prouesses, les "gammes", à tous les travaux dont les recherches de l’OuLiPo m’ont donné l’idée et les moyens : palindromes, lipogrammes, pangrammes, anagrammes, isogrammes, acrostiches, mots croisés, etc. ; la quatrième, enfin, concerne le romanesque, le goût des histoires et des péripéties, l’envie d’écrire des livres qui se dévorent à plat ventre sur son lit ; La Vie mode d’emploi en est l’exemple type.


Cette répartition est quelque peu arbitraire et pourrait être beaucoup plus nuancée : presque aucun de mes livres n’échappe tout à fait à un certain marquage autobiographique (par exemple en insérant dans un chapitre en cours une allusion à un événement survenu dans la journée) ; presque aucun non plus ne se fait sans que j’aie recours à telle ou telle contrainte ou structure oulipienne, ne serait-ce qu’à titre symbolique et sans que ladite structure ou contrainte me contraigne en quoi que ce soit.

Énoncé 2

Raison 1
=
les quatre horizons

Énoncé 2

Pour ma part, je me comparerais plutôt à un paysan qui cultiverait plusieurs champs ; dans l’un il ferait des betteraves, dans un autre de la luzerne, dans un troisième du maïs, etc. De la même manière, les livres que j’ai écrits se rattachent à quatre champs différents, quatre modes d’interrogation qui posent peut-être en fin de compte la même question, mais la posent selon des perspectives particulières correspondant chaque fois pour moi à un autre type de travail littéraire.

 

La première de ces interrogations peut être qualifiée de "sociologique" : comme de regarder le quotidien ; elle est au départ de textes comme Les Choses, Espèces d’espaces, Tentative de description de quelques lieux parisiens, et du travail accompli avec l’équipe de Cause commune autour de Jean Duvignaud et de Paul Virilio ; la seconde est d’ordre autobiographique : W ou le souvenir d’enfance, La Boutique obscure, Je me souviens, Lieux où j’ai dormi, etc. ; la troisième, ludique, renvoie à mon goût pour les contraintes, les prouesses, les "gammes", à tous les travaux dont les recherches de l’OuLiPo m’ont donné l’idée et les moyens : palindromes, lipogrammes, pangrammes, anagrammes, isogrammes, acrostiches, mots croisés, etc. ; la quatrième, enfin, concerne le romanesque, le goût des histoires et des péripéties, l’envie d’écrire des livres qui se dévorent à plat ventre sur son lit ; La Vie mode d’emploi en est l’exemple type.

 

Cette répartition est quelque peu arbitraire et pourrait être beaucoup plus nuancée : presque aucun de mes livres n’échappe tout à fait à un certain marquage autobiographique (par exemple en insérant dans un chapitre en cours une allusion à un événement survenu dans la journée) ; presque aucun non plus ne se fait sans que j’aie recours à telle ou telle contrainte ou structure oulipienne, ne serait-ce qu’à titre symbolique et sans que ladite structure ou contrainte me contraigne en quoi que ce soit.

Énoncé 2

Raison 1
=
les quatre horizons

Énoncé 2

avec quatre compléments :

1. horizon du monde alentour (sociologie)

2. horizon de sa propre histoire (autobiographie)

3. horizon du langage (jeu)

4. horizon de la fiction (roman)

Pour ma part, je me comparerais plutôt à un paysan qui cultiverait plusieurs champs ; dans l’un il ferait des betteraves, dans un autre de la luzerne, dans un troisième du maïs, etc. De la même manière, les livres que j’ai écrits se rattachent à quatre champs différents, quatre modes d’interrogation qui posent peut-être en fin de compte la même question, mais la posent selon des perspectives particulières correspondant chaque fois pour moi à un autre type de travail littéraire.


La première de ces interrogations peut être qualifiée de "sociologique" : comme de regarder le quotidien ; elle est au départ de textes comme Les Choses, Espèces d’espaces, Tentative de description de quelques lieux parisiens, et du travail accompli avec l’équipe de Cause commune autour de Jean Duvignaud et de Paul Virilio ; la seconde est d’ordre autobiographique : W ou le souvenir d’enfance, La Boutique obscure, Je me souviens, Lieux où j’ai dormi, etc. ; la troisième, ludique, renvoie à mon goût pour les contraintes, les prouesses, les "gammes", à tous les travaux dont les recherches de l’OuLiPo m’ont donné l’idée et les moyens : palindromes, lipogrammes, pangrammes, anagrammes, isogrammes, acrostiches, mots croisés, etc. ; la quatrième, enfin, concerne le romanesque, le goût des histoires et des péripéties, l’envie d’écrire des livres qui se dévorent à plat ventre sur son lit ; La Vie mode d’emploi en est l’exemple type.


Cette répartition est quelque peu arbitraire et pourrait être beaucoup plus nuancée : presque aucun de mes livres n’échappe tout à fait à un certain marquage autobiographique (par exemple en insérant dans un chapitre en cours une allusion à un événement survenu dans la journée) ; presque aucun non plus ne se fait sans que j’aie recours à telle ou telle contrainte ou structure oulipienne, ne serait-ce qu’à titre symbolique et sans que ladite structure ou contrainte me contraigne en quoi que ce soit.

Énoncé 2

Raison 1
=
les quatre horizons

Énoncé 2

avec quatre compléments :

1. horizon du monde alentour (sociologie)

2. horizon de sa propre histoire (autobiographie)

3. horizon du langage (jeu)

4. horizon de la fiction (roman)

et une petite précision qui apporte une nuance fondamentale, redistribuant les "horizons" (autobiographie et jeu) [en fait les horizons ne sont pas exclusifs les uns des autres...]

En fait, me semble-t-il, au-delà de ces quatre pôles qui définissent les quatre horizons de mon travail - le monde qui m’entoure, ma propre histoire, le langage, la fiction - , mon ambition d’écrivain serait de parcourir toute la littérature de mon temps sans jamais avoir le sentiment de revenir sur mes pas ou de remarcher dans mes propres traces, et d’écrire tout ce qui est possible à un homme d’aujourd’hui d’écrire : des livres gros et des livres courts, des romans et des poèmes, des drames, des livrets d’opéra, des romans policiers, des romans d’aventures, des romans de science-fiction, des feuilletons, des livres pour enfants...

Énoncé 3

Raison 2

=

l'ambition de tout écrire et toujours autrement

 

[On passe à une justification d’un niveau plus radical : "en fait", "au-delà"] . . .

Énoncé 3

Je n’ai jamais été à l’aise pour parler d’une manière abstraite, théorique, de mon travail ; même si ce que je produis semble venir d’un programme depuis longtemps élaboré, d’un projet de longue date, je crois plutôt trouver - et prouver - mon mouvement en marchant : de la succession de mes livres naît pour moi le sentiment, parfois réconfortant, parfois inconfortable (parce que toujours suspendu à un "livre à venir", à un inachevé désignant l’indicible vers quoi tend désespérément le désir d’écrire), qu’ils parcourent un chemin, balisent un espace, jalonnent un itinéraire tâtonnant, décrivent point par point les étapes d’une recherche dont je ne saurais dire le "pourquoi" mais seulement le "comment" : je sens confusément que les livres que j’ai écrits s’inscrivent, prennent leur sens dans une image globale que je me fais de la littérature, mais il me semble que je ne pourrai jamais saisir précisément cette image, qu’elle est pour moi un au-delà de l’écriture, un "pourquoi j’écris" auquel je ne peux répondre qu’en écrivant, différant sans cesse l’instant même où, cessant d’écrire, cette image deviendrait visible, comme un puzzle inexorablement achevé.

Énoncé 4

Raison 3

=

une certaine image de la littérature

 

[Aveu de « mal-aise » comme pour préparer une prise de recul maximale et livrer une justification encore plus radicale . . .]

 

Énoncé 4

Reconnaissant sa "versatilité systématique", Georges Perec en avance trois justifications : la multiplicité des horizons de son travail, son ambition de tout écrire et toujours autrement, et l’image qu’il se fait de la littérature.

Proposition de condensés

Proposition de condensés

Reconnaissant sa « versatilité systématique », Georges Perec en avance trois justifications. La première tient à la multiplicité des horizons de son travail : le monde, sa propre histoire, le langage et la fiction. Reste que l’auteur reconnaît aussi que, quasi systématiquement, il pratique le « marquage autobiographique » en même temps que la structure oulipienne. Au-delà, c’est son ambition de tout écrire et toujours autrement, mais aussi l’image qu’il se fait de la littérature qui, à ses yeux, justifient plus profondément qu’il n’ait « jamais écrit deux livres semblables ».

Reconnaissant sa "versatilité systématique", Georges Perec en avance trois justifications : la multiplicité des horizons de son travail, son ambition de tout écrire et toujours autrement, et l’image qu’il se fait de la littérature.

Proposition de condensés

Reconnaissant sa « versatilité systématique », Georges Perec en avance trois justifications. La première tient à la multiplicité des horizons de son travail : le monde, sa propre histoire, le langage et la fiction. Reste que l’auteur reconnaît aussi que, quasi systématiquement, il pratique le « marquage autobiographique » en même temps que la structure oulipienne. Au-delà, c’est son ambition de tout écrire et toujours autrement, mais aussi l’image qu’il se fait de la littérature qui, à ses yeux, justifient plus profondément qu’il n’ait « jamais écrit deux livres semblables ».

Reconnaissant sa "versatilité systématique", Georges Perec en avance trois justifications : la multiplicité des horizons de son travail, son ambition de tout écrire et toujours autrement, et l’image qu’il se fait de la littérature.

À la différence du résumé de l’ "expression écrite", tel que pratiqué dans les concours, le résumé du documentaliste-analyste peut garder ses distances avec le texte analysé : le professionnel de l’information ne se met pas forcément à la place de l’auteur…

Proposition de condensés

Reconnaissant sa « versatilité systématique », Georges Perec en avance trois justifications. La première tient à la multiplicité des horizons de son travail : le monde, sa propre histoire, le langage et la fiction. Reste que l’auteur reconnaît aussi que, quasi systématiquement, il pratique le « marquage autobiographique » en même temps que la structure oulipienne. Au-delà, c’est son ambition de tout écrire et toujours autrement, mais aussi l’image qu’il se fait de la littérature qui, à ses yeux, justifient plus profondément qu’il n’ait « jamais écrit deux livres semblables ».

Reconnaissant sa "versatilité systématique", Georges Perec en avance trois justifications : la multiplicité des horizons de son travail, son ambition de tout écrire et toujours autrement, et l’image qu’il se fait de la littérature.

Par ailleurs on remarquera qu’aucun des exemples fournis par l’auteur n’a été repris… Règle qui s’applique à tout type de résumé.

À la différence du résumé de l’ "expression écrite", tel que pratiqué dans les concours, le résumé du documentaliste-analyste peut garder ses distances avec le texte analysé : le professionnel de l’information ne se met pas forcément à la place de l’auteur…

Concernant l'Oulipo :

 

PEREC

By Bruno Richardot